Ce 24 janvier marque le 130ème anniversaire de l’Affaire des époux Thomas, un fait divers teinté de sorcellerie qui se solda par la dernière exécution publique d’une femme en France.
Malheurs et sorcellerie
L’histoire se déroule à la fin du XIXème siècle.
Fermiers à Selles-Saint-Denis sur les terres du Luneau, Sylvain et Georgette Thomas formaient un couple modeste et sans histoires. Comme beaucoup de leurs voisins, ils étaient touchés par les difficultés de la vie paysanne en Sologne et par la malchance due au climat : leurs enfants tombèrent malades tout comme leurs bêtes et les récoltes furent plusieurs fois gâtés par les mauvaises saisons.
Ils se démarquaient toutefois de leurs voisins en un point : Marie Lebon, la mère de Georgette, était mal vue dans le pays. Certains la considéraient même comme une j’teuse de sorts, une sorcière.
Cette croyance en la sorcellerie, que l’on peut penser d’un autre âge, était encore tenace en Sologne. Sylvain et Georgette Thomas furent de plus en plus sûrs d’être victimes d’une malédiction. Ils se rendirent alors à Saint-Viâtre auprès d’un dénoueux de sorts qui leur conseilla alors de se débarrasser de la mère Lebon pour rompre le maléfice.
Plus ou moins manipulé par ce personnage, le couple s’exécuta de façon particulièrement macabre le 29 juillet 1886. Avec la complicité des deux frères de Georgette, ils firent venir Marie Lebon à la ferme du Luneau, l’aspergèrent de pétrole puis la jetèrent directement dans la cheminée allumée. Le tout devant les trois enfants du couple.
Un drame qui fit grand bruit
C’est le témoignage de leur fille Eugénie, 8 ans à l’époque, qui fit condamner les criminels. La Justice, convaincue que le motif était l’héritage Lebon, envoya les frères de Georgette au bagne et condamna les époux Thomas à la guillotine.
L’affaire fut grand bruit et fut relayée par les presses locales et nationales. Bien que celles-ci étaient friandes de faits divers, elles s’interrogeaient également sur l’avenir des trois enfants du couple maudit.
L’exécution publique eut lieu le 24 janvier 1887 à Romorantin sur la Place d’Armes (actuelle Place de la Paix). Elle attira une nombreuse foule venue voir ces gens capables d’une telle horreur. Georgette Thomas espérant jusqu’à la fin une grâce présidentielle fit un tel scandale qu’on décida d’arrêter les exécutions publiques de femmes à partir de cette date.
Par la suite, ce fait divers inspira plusieurs écrivains dont peut-être Émile Zola qui fit brûler le père Fouan dans La Terre, sorti en 1887.
Il fallut attendre 1942 pour que le rôle de la superstition soit pleinement reconnu dans ce drame. C’est l’auteur régionaliste Hubert-Fillay qui montra l’importance de ces croyances dans son roman Des j’teux de sorts à la guillotine.
Sources : archives départementales de Loir-et-Cher ; « Complément d’enquête, l’Affaire Thomas…Un siècle après », 1987, article de presse, bibliothèque numérique des Lanturelus.