On les emprunte tous les jours sans les regarder, on admire leur architecture ou leur prouesse technologique et on se rend compte de leur réelle importance au quotidien quand ils sont parfois fermés à la circulation .
On retrouve les premiers ponts dès la préhistoire.
Qu’ils soient une chaussée de pierres jetées sur un cours d’eau ou suspendu entre deux montagnes, le pont est un ouvrage d’art par excellence. Ces constructions permettent éventuellement d’établir sur les personnes, bêtes et marchandises des « péages » qui deviennent une source importante de revenus.
En 1747 on créera même une école qui leur est dédiée : L’École royale des ponts et chaussées.
À La Ferté
Au Moyen Âge, passerelles ou ponts permettent aux habitants de se déplacer du bourg aux écarts ou dans d’autres villages, tout en favorisant les échanges commerciaux.
Dans l’Île Saint-Taurin, on en compte deux : un sur la Sauldre, un autre sur le Brasseau (ou bras mort) près de l’actuel Prieuré. Ils appartiennent alors aux chanoines qui les entretiennent, les ferment et les ouvrent.
Avec la construction des Grands Moulins, leur gestion passe aussi par seigneur du village, qui la conservera jusqu’à la Révolution **
Les ponts au fil des ans… et de la Sauldre !
Les crues récurrentes de la Sauldre rythment la construction des passerelles ou des ponts, en bois à l’époque. Pas de pierre, bien trop chère !
Ainsi, le 24 décembre 1843 « La Sauldre se mit en crue, les habitants voulant célébrer leurs fêtes de Noël pour venir à l’église *** et établirent des passerelles sur des tréteaux et des échelles et plusieurs des plus hardis tombèrent à l’eau … »
Idem en décembre 1844, puis en février 1846 où « la crue devint telle que les 2 ponts furent emportés ».
On attend les décrues pour pouvoir circuler de nouveau ou on emprunte des passerelles provisoires pour les piétons, les voitures passant à gué.
Constructions et destructions
Le 22 juin 1846, la culée du pont du Prieuré est écroulée, une travée de la passerelle des Grands Moulins emportée.
Il suffit d’une nouvelle crue à l’hiver 1849 pour que les quelques réparations entreprises soient à nouveau défaites. On ne peut suivre les offices religieux ni se faire enterrer au cimetière du village …
En 1850 , on constate : « Les ponts tombent en lambeaux ».
Faute de moyens financiers et malgré les demandes à l’autorité municipale qui est alors à Selles-Saint-Denis, les ponts/passerelles restent délabrés et perturbent le quotidien des Fertois.
En 1852 une demande de restauration du Pont du Prieuré est émise et une lettre au ministère de l’Intérieur envoyée.
La crue du 22 juin 1856 est si l’on peut dire la goutte qui fait déborder le vase. Une nouvelle demande de secours est adressée à la préfecture, au conseil général et une grande souscription est lancée auprès des habitants du village « pour l’établissement d’un pont à voitures » dont le coût est de 7172,24F. Une liste des souscripteurs est établie avec le montant des dons, prestations en nature et matériaux.
Le 15 avril 1858, l’Abbé Bommer, accompagné d’édiles et notables du village, sollicite auprès de Napoléon III, en villégiature dans son château de Lamotte-Beuvron, une aide pour la reconstruction du pont. L’empereur donnera 500F.
Après adjudication, les travaux commencent enfin et le pont n’est finalement délivré qu’à la fin de 1860 : « Le mercredi 30 septembre, fête de St Jérôme, à 2 heures du matin, au son de la cloche, les habitants se réunirent au nombre de plus de 100 hommes munis de seaux, pelles, pioches, finir les fouilles, coulèrent le béton avec un tel entrain qu’à midi toutes les difficultés furent surmontées »
En 1863, une enquête est diligentée pour la suppression du pont du Prieuré. À monsieur Kirby, propriétaire du château qui le jouxte et qui s’en émeut, la préfecture répond : « Payez! »
En 1865, Edward Howarth, propriétaire du château de la Place, demande un pont provisoire au Prieuré pendant la durée de reconstruction : rejeté !
Le 20 mars 1866 : « La crue est passée sur les levées entre le bourg et l’église ».
Les ponts modernes
Adieu passerelles et ponts de bois ! Grâce aux nouvelles technologies et à l’industrialisation naissante La Ferté-Imbault se modernise et le 13 octobre 1886 le village se dote d’un nouveau pont, métallique cette fois.
L’abbé Bommer relate l’événement :
« Construction métallique, premier du genre, qui fut posé dans le Loir et Cher. L’assemblage de toutes les pièces le composant fut fait et boulonné sur les levées : puis, poussé d’ensemble, d’une seule pièce, sur des galets au moyen de crics : 6 hommes ont suffi pour cette opération, qui n’a duré qu’une heure, et émerveillé les nombreux assistants venus des communes environnantes pour être témoin de ce travail d’un nouveau genre. »
Depuis la fin du 19ème siècle, les contraintes techniques et environnementales ont évolué, nos ponts aussi !
Leur gestion, leur construction et leur réparation ne dépendent plus aujourd’hui que des seules ressources territoriales ****. Il reste toutefois un facteur qui lui n’a pas changé : les crues de la Sauldre, qui n’en fait toujours qu’à sa tête !
* Tarr Steps, Parc national d’Exmoor, Somerset,Angleterre (la datation du monument est le sujet d’un débat, la fourchette actuelle s’étend du premier millénaire avant notre ère jusqu’au XVe siècle) Conseil de fabrique, Journal de l’abbé Bommer ** Abel Nonant de Pierrecourt *** Eglise collégiale de St Taurin, dans l’Ile **** Vie publique https://www.vie-publique.fr/questions-reponses/292901-la-securite-des-ponts-en-six-questions
Le week-end prochain (21 et 22 septembre) auront lieu les 41e Journées Européennes du Patrimoine. Comme à son habitude, notre Association en profitera pour ouvrir la chapelle Saint-Taurin à la visite.
À l’intérieur de ce modeste bâtiment fertois, vous pourrez (re)découvrir un joli mobilier et un riche décor qui évoqueront près de 1000 ans de l’histoire de La Ferté-Imbault en particulier et de la Sologne en général.
L’entrée est bien évidemment gratuite et nous vous accueillerons le dimanche 22 septembre, de 9 à 12h et de 14 à 18h.
Tout un chacun peut le vérifier, après un été particulièrement marqué par une forte et longue sécheresse, ce début d’automne est caractérisé par des grosses pluies et des avis de tempêtes… La question de l’eau a toujours été prégnante dans nos campagnes et c’est notamment pourquoi des fontaines étaient installées pour subvenir en toutes saisons aux besoins des habitants.
La fontaine Bazin
À La Ferté-Imbault, on en compte au moins une : la fontaine Bazin.
Si l’origine de son nom ne nous est pas connue (même si on peut recenser le patronyme Bazin au village), et que les cartes anciennes telles que Cassini, cadastrales ou autres* n’en mentionnent pas l’existence, elle n’en est pas moins familière à certains Fertois – depuis longtemps.
Située sur une minuscule parcelle de terrain communal*, elle se fait très discrète. Seule la construction qui la surmonte peut la faire repérer.
S’il y a donc peu d’informations à ce sujet, sa présence et la composition de son eau n’en sont pas moins attestées par les résultats de son analyse chimique, parus en 1862 dans un mémoire de la Société d’agriculture, d’économie rurale et domestique :
L’auteur de la notice ajoute même que « cette eau est d’excellente qualité. Ne contenant aucun sulfate et beaucoup d’acide carbonique, elle est éminemment propre à la boisson ». Il finit par dire que la qualité de cette eau se rapproche extrêmement de celle de « la Fontaine de la Pelotte » à Selles-Saint-Denis et dont il dit « n’avoir trouvé dans ses recherches une eau aussi parfaite ».
Une richesse à préserver
L’eau est devenue une richesse qu’il nous faut préserver, un véritable enjeu environnemental et politique… La guerre de l’eau est déjà commencée, celle des anciennes sources et de la fontaine Bazin sera-t-elle ?
* À noter, lors de la rédaction de cet article, Les Lanturelus se sont aperçus d’une erreur sur le cadastre : la fontaine Bazin est bien mentionnée mais pas au bon endroit. À son emplacement figure un calvaire qui n’existe pas dans la réalité…
Si notre village peut s’enorgueillir de noms célèbres, tels ceux du maréchal d’Estampes et de la marquise de la Ferté-Imbault, il n’a pas à rougir de certains de ceux de ses concitoyens, qui ont œuvré longtemps au village et dont la postérité n’a pas toujours gardé le nom !
Il en va ainsi de l’abbé Augustin Louis Segret, chanoine honoraire de Blois, et curé de la Ferté-Imbault, découvreur d’une renoncule qui porte son nom : Ranunculus felixii, Segret 1936
Petite contexte botanique
On ne peut retracer l’itinéraire « botanique » de l’abbé sans évoquer la place qu’a cette science depuis si longtemps. Depuis le moyen-âge, on cultive et on répertorie les plantes destinées à l’alimentation et à la médecine.
Lui-même inspiré du jardin médiéval, le jardin de curé dont on redécouvre aujourd’hui le charme et la simplicité, est un concentré de connaissances botaniques et de techniques de culture. On sort parfois de son presbytère et de son enclos et on se promène en campagne :
« Au XIXe siècle, les sciences naturelles connaissent un âge d’or et la botanique bénéficie alors d’un véritable engouement auprès des médecins, pharmaciens, instituteurs et curés de campagne, qui herborisent à proximité de chez eux. C’est aussi l’époque des voyages naturalistes. Les botanistes échangent entre eux échantillons et observations »1
L’abbé Segret, botaniste émérite
Augustin, né à Vernou-en-Sologne le 27 août 1867, est ordonné prêtre le 23 mai 1891. Il est d’abord vicaire de Cour-Cheverny. Il est desservant à St Loup en 1893. En 1894 il est le curé de Maray puis devient celui de La Ferté en 1923 et ce jusqu’à son décès en 1949.
C’est durant sa première cure à Cour-Cheverny, qu’il se familiarise avec le monde de la botanique.2
En compagnie de personnes aguerries dans cette discipline, il commence à herboriser et cataloguer les plantes de Sologne puis, dès 1903, il est nommé membre de la Société Botanique de France.
Pendant de nombreuses années il parcourt la Sologne et ses talents de botaniste se confirment quand :
« Permettez-moi d’attirer votre attention sur un Ranunculus, sect, Batrachium que j’ai trouvé en 1924 en compagnie de M.A. Félix3 et dont l’hybridité est incontestable. Il est du croisement de hololeucos et du tripartitus. Dans la petite marre ou nous l’avons récolté, on ne rencontre que ces deux dernières espèces, à l’exclusion absolue de tout autre batrachium. »3
Quelle consécration pour un modeste curé de campagne !
En 1928, l’abbé déplore toutefois que la Sologne d’alors :
« ne ressemble plus à celle d’autrefois … Je l’ai montré lors de la session extraordinaire de la société Botanique de France à Romorantin et les environs : cette ville ne doit plus être sa « capitale » comme on disait jadis. Le centre de la Sologne doit être reporté vers Loreux, Millançay, Marcilly-en-Gault et la Ferté Imbault… »5
Parti pris d’un homme de science qui ne conçoit la capitale que sous l’œil averti du botaniste !
La Ferté-Imbault n’est toujours pas capitale …
Membre de la Société Botanique de France, il est nommé Officier d’Académie en janvier 1935 « pour services rendus aux sciences ».
Après une vie bien remplie, au service des hommes et des plantes, l’abbé meurt le 6 décembre 1949 à La Ferté Imbault où il est inhumé.
Dimanche c’est l’Épiphanie ! Ceux qui sont allés au « cathé » se rappelleront que c’est le jour où les Rois mages arrivèrent à Bethléem, chargés de cadeaux pour l’enfant Jésus.
Les autres sont plus convaincus par la galette que l’on partage traditionnellement en famille et entre amis. C’est qu’elle est bien bonne cette galette « quand elle est bien faite, avec du beurre dedans. »
À La Ferté-Imbault, il semble qu’on l’aimait tout particulièrement. D’après Bernard Edeine*, elle est même le sujet « d’un branle fort célèbre en Sologne (La Ferté-Imbault, Gy, Lassay, Souesmes) qui se dansait à la voix ou accompagnement de vielle :
En avant la mé Bernaussiau
Tape du cul, t’auras de la galette,
En avant la mé Bernaussiau,
Tape du cul, t’auras du gatiau.
La tradition, malheureusement (?), n’a retenu que les paroles mais pas la mélodie qui allait avec…
*Bernard Edeine était professeur, archéologue et ethnologue de la Sologne
Si Saint Taurin reste le Saint patron de La Ferté-Imbault, d’autres personnages pieux furent honorés au village.
Et parmi eux, Saint Nicolas, qu’on fête un peu partout en Europe le 6 décembre, et particulièrement dans l’est de la France.
Ici aussi, une église fut dédiée à son culte. Pillée, puis dévastée lors des invasions anglaises du XVe siècle, sa démolition pour cause de vétusté fut actée en 1748, ses biens (terrains, cimetière…) vendus ou dispersés.
Le souvenir de cette église perdure malgré tout grâce à une rue qui porte son nom aujourd’hui : rue ou ruelle Saint-Nicolas.
Certains la connaissent encore sous le vocable bien peu déférent de « rue merdeuse » … mais qui n’apparait pas dans la toponymie officielle de notre commune !
La légende
Au retour de ses pérégrinations, Saint Nicolas s’arrête au logis du boucher, qui a assassiné, mis en tonneau et au saloir 3 petits enfants. Bientôt ressuscités par le bon Nicolas.
Accompagné du méchant Père Fouettard, il reste malgré un Père Noël un peu envahissant, un personnage bienveillant pour les enfants sages qui recevront, ce jour, multiples récompenses et friandises !
La Toussaint est une fête catholique, autrefois célébrée après la Pentecôte, fixée au 1er novembre à partir de l’an 835. Également jour de la fête païenne de Samhain* pour les Celtes, qui honorent le passage à la saison d’hiver et le jour de l’an. Devenue All Hallow’s Eve (veille de tous les saints) puis Halloween, fête culturelle et folklorique anglo-saxonne.
Ni monstres, ni bonbons ni citrouilles pour ce jour qui fête au IVème siècle tous les martyrs puis tous les saints chrétiens connus ou inconnus.
Tous les prénoms de tous les saints ?
Parallèlement à une christianisation de plus en plus importante, il devient d’usage de choisir le prénom de ceux-ci pour les nouveaux-nés. Si on observe encore beaucoup de noms à consonance germanique tels que Childeric, Sigoald ou Arnegonde, le XIème siècle voit l’émergence de noms plus latins, Aurélie, Bénédicte, Martin, mais aussi issus de la littérature de l’époque : Lancelot, Gauvain…
La Révolution de 1789 change la donne : exit les saints et les fêtes religieuses ! On nomme sa progéniture avec les prénoms usuels ou selon les jours et les mois du calendrier républicain : on peut s’appeler alors Salsifis ou Perce-neige, Nivôse ou Floréal…
La loi du 11 germinal an XI (1er avril 1803) oblige ensuite les parents à choisir le prénom dans divers calendriers français ou de personnes issues de l’histoire ancienne.
Longtemps la législation autorisa uniquement les prénoms du calendrier chrétien, de la mythologie : Brutus, Achille ou encore Hector ; et divers prénoms régionaux pas toujours acceptés selon les départements.
la loi du 9 janvier 1993 bouscule tout cela. On appelle ses enfants comme on veut, sous l’œil toutefois vigilant de l’officier d’État civil si « le choix du prénom est contraire à l’intérêt de l’enfant ». On peut s’appeler Brandon (série télévisée) mais pas Nutella ou Clafoutis (refusés en 2021)…
Il serait, par contre, tout à fait possible pour les futurs parents de prénommer leurs enfants Taurin, Genoulf, Montaine, Viâtre, bien connus dans nos contrées …ou Silvain et Silvine qu’on rencontre souvent dans les registres paroissiaux solognots…
* Samhain ou Samain : jour où le dieu de la mort informe les trépassés de l’année de leur nouvelle « réincarnation »
Après 2 années sans manifestation à cause de l’épidémie de COVID 19*, notre association organise de nouveau les Journées Européennes du Patrimoine à La Ferté-Imbault. Ce sera les samedi 17 et dimanche 18 septembre !
Au programme : des visites de la chapelle Saint-Taurin, de l’église du village et même du cimetière. À travers ces trois lieux, nous vous invitons à (re)découvrir l’histoire de notre village depuis sa création jusqu’à ses plus récentes évolutions. Nous évoquerons les personnages, connus ou plus modestes, qui ont fait La Ferté, nous parlerons des bâtiments et de leurs symboliques, de l’histoire religieuse mais aussi des anciennes industries, des épisodes guerriers, d’anecdotes liées à la « Grande » histoire et de toutes sortes d’événements !
Toutes les informations sont dans l’affiche (un petit récapitulatif est présenté sous cette dernière)
Informations
Visites gratuites organisées par l’Association Les Lanturelus
Nul doute que celui qui a inventé l’école n’avait probablement pas imaginé les difficultés qui ont présidé à la formation de celle que nous connaissons aujourd’hui. Pendant des siècles, le savoir est bien peu partagé, et si dès le moyen-âge des universités renommées voient le jour, il est réservé à une élite essentiellement masculine.
Il faudra attendre le XIXème siècle pour que cet état de fait change véritablement, grâce à diverses et nombreuses lois qui ont bouleversé l’enseignement.
L’École est alors un enjeu politique important, entre l’État et l’Église qui se disputent son organisation.
Il faut noter aussi, quand on parle de l’École, qu’il s’agit d’éducation et non pas seulement des bâtiments spécifiques qui lui seront dévolus ultérieurement. On fait alors la classe là où il y a assez d’espace pour installer les élèves (au besoin s’ils sont nombreux, on les entasse ..), au presbytère, à la mairie ou dans le logement particulier du maître. Un mobilier précis ne sera d’ailleurs obligatoire qu’à partir de 1887.
On peut retenir les dates les plus importantes :
– 1833 : La loi Guizot organise les prémices d’une instruction publique pour les écoles primaires de garçons, assurée par les communes, avec l’aide de l’État et de l’Église : la mairie doit fournir un local convenable à l’instituteur ( qui sert très souvent à la fois d’habitation et de lieu d’enseignement) et fixe le montant de son traitement, souvent formé des centimes additionnels *. Elle dispose également que les élèves dont les familles ne pourraient assurer le paiement de l’école soient accueillis gratuitement (le nombre étant fixé par le préfet…)
Peu d’enfants sont scolarisés, surtout à la campagne où on a besoin d’une main d’œuvre abondante et gratuite. L’instruction des filles est elle-même très peu concernée…
– 1850 : Loi Falloux, qui permet aux établissements libres d’obtenir un local et/ou une subvention de la commune, du département, de l’État.
– 1867 : Le ministre Duruy ouvre l’instruction primaire publique aux filles. Les communes de + de 500 habitants peuvent établir la gratuité absolue grâce aux centimes additionnels communaux.
– 1870 : L’arrivée de la IIIème république marque le début de la sécularisation de l’enseignement public.
– 1881/1882 : Jules Ferry révolutionne l’école publique : l’enseignement primaire devient obligatoire, laïc et gratuit pour tous (de 6 à 12 ans).
A La Ferté
La Ferté Imbault, petite commune de Sologne, suit le mouvement. L’école, comme bien d’autres sujets, sera le motif de nombreuses et parfois violentes querelles intestines entre les différents acteurs du village (mairie, curé, châtelain).
– En 1841, s’il y a une école communale, c’est à Selles St Denis, La Ferté Imbault n’étant que section de cette commune.
– 1845 : L’abbé Bommer, desservant à La Ferté Imbault, instruit son supérieur hiérarchique de son désir d’ouvrir une école, en présentant à l’École Normale son poulain, M.Vannier. Les tracasseries administratives mettent fin au projet.
– 1847 : L’abbé instruit quelques enfants et adultes. N’ayant pas de brevet de capacité (obligatoire pour enseigner) il est sommé par la préfecture de cesser son enseignement.
– 1849 : Distance oblige, seuls 8 enfants fertois fréquentent l’école communale de Selles St Denis.
– 1850/1851 : Mary Ann Howarth, épouse Kirby, organise une petite école pour les enfants des domestiques et journaliers travaillant au château.
– 19 août 1850 : ouverture de l’école libre de l’abbé Bommer, installée dans l’une des chambres du presbytère qu’il occupe dans l’île St Taurin (maison du Prieuré) dont son frère François Edouard ** (choisi par la mairie) est l’instituteur diplômé.
La classe est meublée grâce aux dons. Le nombre d’élèves augmente sensiblement : 70 enfants (garçons) et 14 adultes sont inscrits 6 mois plus tard.
L’école libre ne pouvant rémunérer suffisamment son instituteur, le manque de place et la réunion des garçons et filles n’étant pas autorisée, il écrit au recteur d’académie :
Considérant que répandre l’instruction et surtout l’éducation, c’est entrer dans les vues du gouvernement et que, et du reste, nous avons indistinctement tous droit à cet aliment des intelligences. L’instruction qui orne notre esprit et étend ses connaissances : l’éducation qui forme le cœur et redresse ses mauvais penchants.
En raison de ces divers considérants, nous vous prions, Messieurs, de vouloir bien prendre en sérieuse considération notre supplique et reconnaître la nécessité de changer l’école libre de La Ferté Imbault en école communale.
et à son évêque :
C’est dans ce but, que je désire voir reconnaître une école communale dans ma paroisse. Je sais qu’il serait à désirer de voir une école pour les garçons et une autre pour les filles ; mais, comment soutenir deux écoles, quand nous ne pouvons même pas en soutenir une ?
A sa demande, l’école libre est classée publique en 1853 et la réunion des garçons et filles autorisée.
Selon le décret qui fixe le nombre d’enfants admis gratuitement à l’école, une liste de 10 enfants est établie, conjointement avec la municipalité et le curé.
En 1854, une nouvelle école libre pour jeunes filles dirigée par Eugénie Bommer, cousine de l’abbé et épouse d’Alphonse Sainmont, premier instituteur public au village, est ouverte.
… elle élèvera une école libre dans la commune pour les jeunes filles au grand désir des familles notables des deux paroisses, nous attendons donc beaucoup de bien de cette école ; car si nous sommes déjà témoins du bon résultat de l’école existante, où il y a réunion des deux sexes, nous espérons au moins autant sinon plus de notre école de jeunes filles. L’éducation des jeunes filles ne peut être véritablement formée d’une manière avantageuse et utile que par la femme elle même. Les instituteurs, tout bons soient-ils, n’entendent rien à former le cœur et l’éducation des jeunes filles…
Mais, en 1857 :
Le premier octobre 1857, M. Alphonse Sainmont, instituteur communal et Madame Sainmont, sa femme, institutrice libre, furent nommés dans la commune de Thenay pour en diriger l’école. En conséquence de ce changement, les deux écoles de La Ferté Imbault furent réunies en une école mixte, réunion des deux sexes, et M. Charles Lesourd, élève de l’école normale de Blois, en fut nommé instituteur et prit possession le premier octobre.
1869 : une autre école libre est créée, mobilier et traitement à la charge de l’abbé, installée en 1876 dans une maison du centre du village et bientôt rachetée par le châtelain et futur maire, Auguste Fresson.
Si le curé ne tarit pas d’éloges sur ses deux institutrices religieuses, il n’en est pas de même pour l’institutrice laïque***, accusée en 1876, d’immoralité et de mauvais traitements sur ses élèves :
Caractère mou et indécis, sans zèle pour l’instruction, sans programme, sans méthode, sans emploi du temps : elle n’a rien de constitué l’institutrice. Aussi nos enfants perdent ils leur temps. Autant ils aimaient l’école autrefois ; autant ils la fuient aujourd’hui. Elle les éloigne par son peu d’attrait, par ses punitions intempestives et ridicules : telles que frapper, pincer les oreilles : mettre à la porte de la classe : donner jusqu’à 200 lignes à copier, faire avec la langue une barre sous 4 ou 6 carreaux : moyen de décourager les enfant et de leur faire haïr la classe.
Point de travail manuel dans la classe, elle prétend que c’est perdre le temps : point de politesse, peut-il en être autrement quand la maîtresse, soit bêtise, soit ignorance ne pratique pas elle même les premiers éléments de la civilité française.
Est-ce en faisant lire à nos enfants dans la mythologie : les histoires de Jupiter, Junon, Vénus, Apollon, Mercure et Bacchus, qu’elle formera leur cœur : pauvre fille, elle ne se doute pas de ce que c’est l’éducation d’une jeune fille !
Elle ne dépend dit-elle à ses enfants de personne ni du maire ni du curé, elle ne prend ordre que de son inspecteur. Aussi, nos enfants deviennent de plus en plus indociles, désobéissantes, menteuses, coquettes, car on porte la toilette ; mais, de religion, néant !! De surveillance en dehors de sa classe, point : aussi, dans sa cour, il se passe et se dit des choses que nous ne pouvons pas raconter.
Avec des institutrices laïques, pas de stabilité : pas de garanties morales : des jeunes filles qui viennent faire leur apprentissage pédagogique à nos dépends : en attendant des maris. Réclamez, pauvres paysans, vous voyez le cas que l’on fait de vos observations !
En 1882, l’école devenue obligatoire complique singulièrement la vie des parents et enfants éloignés du bourg :
La Noue commune de La Ferté Imbault
26 septembre 1882
Monsieur le Préfet,
La Noue, où je demeure est 7 kilomètres de La Ferté Imbault, à 7 kilomètres de Marcilly et 7 kilomètres de Selles St Denis.
On me demande que j’envoie à l’école ma petite fille âgée de 7 ans.
Cet enfant ne peut faire 14 kilomètres par jour et je vous prie de m’autoriser à ne pas l’envoyer à l’école tant qu’on n’aura pas fait une école de hameau à la Noue ou à Chardonnières.
Il me semble qu’on ne peut forcer un enfant de 7 ans à faire 14 kilomètres par jour.
J’ai confiance dans votre justice, Monsieur le Préfet, et je suis convaincu que vous m’approuverez.
Agréez, Monsieur le Préfet ….
L.Parfait
1885 : construction d’une école publique au hameau de Chardonnières
Il faudra attendre 1895 pour que la Ferté Imbault commence les travaux du bâtiment de sa future mairie-école qui sera inaugurée en 1898 et dont Gaston Percheron dont elle porte le nom, sera le directeur dans les années 1930. Raymond Bordes, maire du village et conseiller départemental donnera le sien au bâtiment construit ultérieurement.
1903 : Melle Lucie Poissonneau déclare à la mairie « son intention de diriger l’école primaire de jeunes filles et le cours d’adultes » dans un local appartenant à M. de Curel (propriétaire du château de la Place)
Autres lieux « d’enseignements »
D’autres écoles ont vu le jour au village. On trouve aux archives municipales des demandes d’autorisation pour une école privée à l’orphelinat Ste Françoise (Rothère), hébergée provisoirement en 1940 au château de la Fontaine Harlot, dite « maison d’éducation de jeunes délinquants et d’enfants en danger moral » en 1946 et pour « garçons arriérés » en 1947.
École publique, école libre … chacun d’entre nous a fréquenté l’une ou l’autre de ces institutions.
A tous les élèves de cette nouvelle année scolaire qui commence : Bonne rentrée !
* Les coûts de fonctionnement de l’enseignement primaire sont financés principalement par les communes et les ménages, mais également par l’État et les départements et pour un très faible montant par des dons et legs. Ces financements ont largement évolué sur la période 1855-1875 et leur répartition est très différente selon les départements. Il faut en effet bien noter que le financement de l’enseignement primaire dépendait en premier lieu des communes, si celles-ci étaient suffisamment riches elles pouvaient très fortement réduire la participation des parents, inversement si leurs ressources ordinaires étaient insuffisantes elles pouvaient voter trois centimes additionnels aux taxes locales. Si les ressources communales étaient encore insuffisantes les départements pouvaient également voter deux centimes additionnels et en dernier lieu il était fait appel à l’État pour concourir au traitement des enseignants. Ainsi plus la zone géographique est riche, plus la part des communes est importante et inversement plus la zone est pauvre, plus la part de l’État est importante.
** François Bommer meurt le 18 mars 1851, remplacé par Alphonse Sainmont, qui deviendra ultérieurement instituteur de l’école devenue publique.
*** Le 29 mars 1877, l’institutrice est déplacée et nommée à Mur de Sologne.
Sources : Archives municipales de la Ferté Imbault, classeurs 15,16,16 bis.
En 1936 le Front Populaire instaure les congés payés. C’est le début des premières vacances pour toute une part de la population française. Dès lors, on prend la voiture familiale (ou les vélos) et on pique-nique sur les bords de la Marne (ou de la Sauldre!), on découvre la mer pour la première fois, on fait du camping sauvage à la campagne… Le tourisme familial se développe partout et il faut profiter un maximum des jours repos instaurés par la loi du 20 juin 1936. Pensez donc : 2 semaines de liberté !
… Et vacances mondaines
Cette nouvelle forme de villégiature est bien différente de celle qui prend tout son essor au XIXème siècle. À cette époque, la « maison de campagne » qu’on part visiter de temps en temps est un lieu qui permet à la fois d’asseoir son statut social ; d’exercer une administration terrienne et agricole (on va aller vérifier si le gestionnaire et les fermiers ont bien travaillé) ; et enfin un lieu de plaisir où l’on reçoit ses amis, sa famille… Quand on quitte la ville, on annonce par voie de presse où et quand M. & Mme passeront leur été …et si c’est au château, c’est encore mieux !
Deux visions différentes d’un temps libre, bien retranscrites par ces cartes postales éditées à la Ferté Imbault et ces annonces mondaines….